Indignez-vous !
Publié le vendredi 25 juillet 2014, 13:52 - modifié le 09/11/14 - PROCHE-ORIENT - Lien permanent
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C'est le moment de relire (ou relire) l'essai de Stéphane Hessel, publié en 2010 aux Editions Indigènes.
Le Café des Vallées vous propose ci-dessous, d'en relire le chapitre consacré à la Palestine, actualité oblige.
Mon indignation à propos de la Palestine
Aujourd'hui, ma principale indignation concerne la Palestine, la bande de Gaza, la Cisjordanie. Ce conflit est la source même d'une indignation. Il faut absolument lire le rapport Richard Goldstone de septembre 2009 sur Gaza, dans lequel ce juge sud-africain, juif, qui se dit même sioniste, accuse l'armée israélienne d'avoir commis des « actes assimilables à des crimes de guerre et peut-être, dans certaines circonstances, à des crimes contre l'humanité » pendant son opération "Plomb durci" qui a duré trois semaines. Je suis moi-même retourné à Gaza, en 2009, où j'ai pu entrer avec ma femme grâce à nos passeports diplomatiques afin d'étudier de visu ce que ce rapport disait. Les gens qui nous accompagnaient n'ont pas été autorisés à pénétrer dans la bande de Gaza. Là et en Cisjordanie. Nous avons aussi visité les camps de réfugiés palestiniens mis en place dès 1948 par l'agence des Nations unies, l'UNRWA, où plus de trois millions de Palestiniens chassés de leurs terres par Israël attendent un retour de plus en plus problématique. Quant à Gaza, c'est une prison à ciel ouvert pour un million et demi de Palestiniens. Une prison où ils s'organisent pour survivre. Plus encore que les destructions matérielles comme celle de l'hôpital du Croissant rouge par "Plomb durci", c'est le comportement des Gazaouis, leur patriotisme, leur amour de la mer et des plages, leur constante préoccupation du bien-être de leurs enfants, innombrables et rieurs, qui hantent notre mémoire. Nous avons été impressionnés par leur ingénieuse manière de faire face à toutes les pénuries qui leur sont imposées. Nous les avons vu confectionner des briques faute de ciment pour reconstruire les milliers de maisons détruites par les chars. On nous a confirmé qu'il y avait eu mille quatre cents morts — femmes, enfants, vieillards inclus dans le camp palestinien — au cours de cette opération "Plomb durci" menée par l'armée israélienne, contre seulement cinquante blessés côté israélien. Je partage les conclusions du juge sud-africain. Que des Juifs puissent perpétrer eux-mêmes des crimes de guerre, c'est insupportable. Hélas, l'histoire donne peu d'exemples de peuples qui tirent les leçons de leur propre histoire.
Je sais, le Hamas qui avait gagné les dernières élections législatives n'a pas pu éviter que des rockets soient envoyées sur les villes israéliennes en réponse à la situation d'isolement et de blocus dans laquelle se trouvent les Gazaouis. Je pense bien évidemment que le terrorisme est inacceptable, mais il faut reconnaître que lorsque l'on est occupé avec des moyens militaires infiniment supérieurs aux vôtres, la réaction populaire ne peut pas être que non-violente. Est-ce que ça sert le Hamas d'envoyer des rockets sur la ville de Sdérot ? La réponse est non. Ça ne sert pas sa cause, mais on peut expliquer ce geste par l'exaspération des Gazaouis. Dans la notion d'exaspération, il faut comprendre la violence comme une regrettable conclusion de situations inacceptables pour ceux qui les subissent. Alors, on peut se dire que le terrorisme est une forme d'exaspération. Et que cette exaspération est un terme négatif. Il ne faudrait pas ex-aspérer, il faudrait es-pérer. L'exaspération est un déni de l'espoir. Elle est compréhensible, je dirais presque qu'elle est naturelle, mais pour autant elle n'est pas acceptable. Parce qu'elle ne permet pas d'obtenir les résultats que peut éventuellement produire l'espérance.
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